Le bâtiment ancien accueille 30 élèves dans 2 classes et héberge des locataires à l’étage. L’escalier est dans le vestibule. De l’inconfort thermique des salles de classe à l’absence d’accès privatif aux logements en passant par les W.-C. au fond de la cour, le cahier des doléances s’alourdit. Pour apporter des réponses aux usagers, le maire Antoine J.* consulte Arthur Peyne, architecte-conseiller au CAUE de l’Aude...
Antoine J. : Le personnel et les parents d’élèves rapportent qu’il fait trop froid ou trop chaud dans les classes. Pourtant l’école a été rénovée au début des années 2000. Est-ce que ça n’aurait pas fonctionné ? Que pourrait-on faire pour améliorer le confort thermique ?
Arthur Peyne : Sur vos photos, je vois que les salles de classes sont traversantes donc on peut les ventiler l’été. C’est un très bon point. Le bâtiment est bien construit, en maçonnerie, avec des murs épais juste plâtrés qui gardent la fraîcheur l'été. Ce qui pose plus problème, ce sont les planchers bois. Souvent le plancher au rez-de-chaussée où sont les salles de classe est sur vide sanitaire, ou sur un sous-sol froid et humide, et n’est pas isolé car l’endroit est difficile d’accès. Au-dessus, les locataires ne chauffent pas aux mêmes températures que l'école, ce décalage ne profite pas aux usagers. Dans les années 2000, suite aux demandes des pompiers, des plafonds coupe-feu ont été aménagés dans les établissements accueillant du public, mais sans isoler correctement. C’est probablement le cas pour le plancher haut de l’école. Dans le cadre de ces rénovations, on a positionné les faux plafonds assez bas en pensant que cela réduirait le volume à chauffer. Revers de la médaille : on a perdu un volume qui était très agréable, l’air chaud se stockait en haut l’été et l’acoustique était bien meilleure.
A. J. : Quels seraient alors les principaux postes de dépenses pour la thermique ?
A. P. : Les planchers, car en général il faut tout refaire en intégrant les enjeux thermiques et acoustiques ce qui revient cher. Le plancher haut devra être isolé et il faudra créer des plafonds acoustiques corrects pour le confort des enfants et du personnel, tout en conservant un dispositif coupe-feu. Le plancher bas, à condition de disposer d’un accès par le vide sanitaire, devra être isolé également.
Le deuxième gros poste de dépenses, ce sont les menuiseries avec des impostes cintrées. Il faudra remplacer les fenêtres car c’est du simple vitrage ainsi que les portes d’entrées qui ne sont pas isolées. Le changement peut se faire progressivement par lots pendant les vacances scolaires et les portes être juste doublées à l'intérieur avec un complément thermique sur le vantail, par économie.
A. J. : Comme l’école n’est pas en secteur protégé, est-ce que je peux poser des fenêtres de type PVC ?
A. P. : Sur le principe c’est possible, mais ce n’est pas conseillé par rapport à l'image patrimoniale du bâtiment et pour des questions écologiques. Avec le bois, l'avantage technique est que les menuiseries sont mieux isolées et que l'on peut réparer (poncer, reboucher, ajuster, etc.). Si c'est un menuisier fabriquant il fera attention à la pose. Par contre, il faut oublier les menuiseries lasurées qui demandent trop d'entretien et privilégier des menuiseries avec une peinture opaque spécial bois. Si vous mettez des fenêtres de type PVC, outre le fait que ce sera peu esthétique (huisseries blanches épaisses) et moins performant, vous risquez aussi d'avoir de simples poseurs qui ne sont pas menuisiers de métier. Par contre, un compromis pourrait être des menuiseries en aluminium, avec une peinture grainée.
A. J. : Une autre doléance concerne les W.-C. qui sont au fond de la cour. Est-ce qu’il y aurait moyen de les installer dans le bâtiment ?
A. P. : Le plus simple serait probablement de positionner un bloc W.-C. un peu compact au niveau du vestibule d’entrée. Cette option présenterait plusieurs avantages. Elle permettrait de garder la continuité de part et d’autre du bloc sanitaire entre les salles de classes qui sont en enfilade, et donc chaque salle pourrait accéder au bloc par le vestibule. En outre, le bloc W.-C. ferait office de sas thermique en coupant le courant d’air dans l’entrée lorsque les portes sont ouvertes. On pourrait en outre lui adjoindre un placard de rangement. Les réseaux seraient alimentés via le vide sanitaire. Et on pourrait installer une petite VMC et raccorder celle-ci latéralement avec les salles de classe pour en améliorer la ventilation et limiter l'humidité dans l'air.
A. J. : Vous pensez qu’il y aurait la place dans le vestibule ?
A. P. : Pour respecter les normes d’accessibilité, il se peut qu’on ne puisse faire qu’un seul W.-C. avec lavabo et qu’il reste mixte fille/garçon, mais ce sera déjà plus confortable. Il faudrait mesurer pour vérifier l'espace disponible et voir où placer un sanitaire pour le personnel (pas les même cuvettes que les enfants).
A. J. : Et les 6 W.-C. actuels de la cour, on en fait quoi ?
A. P. : C’est un débat à avoir avec les usagers. Vous pourriez les garder pour la récréation, ça peut dépanner, plutôt que de les détruire. Le fait d’avoir 1 à 2 W.-C. en plus à l’intérieur, tout le monde appréciera même s’il n’y en a pas forcément assez.
A. J. : Actuellement, le personnel, les élèves et les locataires rentrent dans le bâtiment par la même porte. Il y a des perturbations. Cette situation ne peut plus durer. Mais comment faire pour séparer les accès ?
A. P. : La première option, si les circulations dans le bâtiment le permettent, consiste à condamner le vestibule où se trouve l’escalier pour le dédier uniquement aux locataires. On mure alors le passage pour le personnel et les salles de classe afin de bien séparer les usages et de recréer du coupe-feu entre les tiers.
Quand ce n’est pas possible pour des questions de configuration de l’école car l’escalier tombe au mauvais endroit, la seule solution c’est de réfléchir à créer une circulation extérieure, avec un escalier rapporté adossé au pignon du bâtiment. Soit on parvient avec l’escalier à desservir les 2 logements parce qu’on arrive à l’endroit opportun à l’étage, soit on n’y arrive pas et alors la solution consiste à créer une coursive pour desservir les logements, par la façade sud de préférence, et ainsi procurer en même temps de l’ombrage aux salles de classe. L’ensemble serait idéalement réalisé dans une écriture contemporaine (métal ou béton ou bois) mais sans dénaturer le bâtiment d'origine. Les deux scénarios s’étudient, sachant que la deuxième option est de loin la plus lourde et la plus onéreuse.
Légende photo haut de page : Ecole primaire dite école Jules Ferry à Hyères, inscrite au patrimoine des monuments historiques.
Légendes du diaporama (de gauche à droite) :
Croquis du CAUE pour l'insertion d'un bloc W.-C. et principes de ventilation pour l'école de Caunes-Minervois, Extension et restructuration du groupe scolaire scolaire de Canohès (66) par Passelac & Roques, concepteurs, photos : ©Kevin Dolmaire.
*Antoine J. est un maire fictif. Cet article participe d’une série sur les problématiques des élu.e.s que nous rencontrons. Il vise à illustrer de quelle(s) façon(s) le CAUE accompagne les besoins des collectivités.
Ci-dessous, en téléchargement, fiche-conseil pour la commune de Caunes-Minervois, avec l'aimable autorisation des élu.e.s.
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